L’ASSAINISSEMENT : UNE URGENCE SANITAIRE ET ENVIRONNEMENTALE

L’ASSAINISSEMENT : UNE URGENCE SANITAIRE ET ENVIRONNEMENTALE
Déborah Mbuyi
16 octobre 2025

Kinshasa fait face à une grave crise des déchets, avec plus de 15.000 tonnes produites chaque jour et 95 % mal gérées. Le Forum Économique sur l’Assainissement Durable (FEAD 2025), prévu du 28 au 30 octobre, vise à transformer ce défi en opportunité économique. Il promeut la valorisation des déchets, la formalisation des collecteurs et la création d’emplois verts pour bâtir une ville propre, résiliente et durable.

Kinshasa, mégapole en pleine expansion, fait face à une urgence silencieuse : celle de la gestion de ses déchets. Chaque jour, plus de 15.000 tonnes de déchets municipaux solides sont générées, soit près de 5 millions de tonnes par an. Pourtant, 95 % de ces déchets sont encore jetés dans la nature, dans les rivières ou brûlés à ciel ouvert. Ce constat alarmant entraîne une pollution extrême de l’air et de l’eau, des inondations récurrentes, la résurgence de maladies comme le choléra ou la typhoïde, et des pertes économiques considérables.

C’est dans ce contexte que se tiendra, du 28 au 30 octobre 2025, au Hilton Hôtel de Kinshasa, le Forum Économique sur l’Assainissement Durable (FEAD 2025). Cette rencontre inédite réunira décideurs, entreprises, investisseurs et jeunes innovateurs autour d’une ambition commune : faire de la salubrité publique un véritable moteur de croissance inclusive et de fierté kinoise.

Le forum entend démontrer que derrière la crise se cache un potentiel économique immense. La session 4, consacrée aux filières économiques de l’assainissement, mettra en lumière la valeur que représentent les déchets, depuis la collecte jusqu’à la valorisation, en passant par le tri et la digitalisation des flux financiers. Ces étapes constituent autant de leviers d’emplois verts, d’investissements et de résilience urbaine.

Mais le défi ne se limite pas aux ordures solides. Chaque année, Kinshasa rejette plus de 2,4 millions de tonnes d’eaux usées et de boues fécales sans traitement : zéro station d’épuration, à peine 3 % des ménages raccordés à un réseau d’égouts, et des vidanges sauvages qui polluent les rivières. Dans ce domaine, la session 7 explorera l’économie de la gestion durable des déchets liquides et montrera comment la valorisation des boues fécales et eaux usées peut produire du biogaz, du compost et prévenir les inondations grâce à des stations décentralisées (DEWATS) et à une filière de vidange mécanisée.

Sur le plan économique, la capitale dépense sans le savoir plus de 300 millions USD par an dans une gestion informelle des déchets, dominée à 85 % par des collecteurs non structurés. Pourtant, le budget requis pour une gestion efficace est estimé à 17 millions USD par mois, soit près de la moitié des revenus générés par cette collecte informelle. Le forum abordera cette problématique à travers la session 11, dédiée aux partenariats et financements de l’assainissement. Celle-ci proposera un cadre innovant fondé sur les crédits carbone, la responsabilité élargie des producteurs et les contrats d’offtake, pour faire de l’assainissement un secteur rentable, sécurisé et créateur d’emplois verts.

Dans le même esprit, le FEAD 2025 entend amorcer la formalisation de la filière. Aujourd’hui, plus de 85 % des collecteurs à Kinshasa opèrent dans l’informel. Le forum défendra la création de coopératives locales agréées, intégrées aux systèmes municipaux, et dotées d’un accès à des microfinancements, à des équipements et à des mutuelles. L’objectif : professionnaliser la collecte, renforcer la gouvernance et bâtir une économie circulaire locale.

Au-delà de la propreté, c’est une véritable transition écologique qui s’annonce. Les déchets représentent 23 % des émissions de gaz à effet de serre en RDC, soit 164,8 millions de tonnes de CO₂e par an — davantage que 117 pays industrialisés. En plaçant l’assainissement au cœur de la lutte climatique urbaine, le forum veut inverser cette trajectoire et transformer une menace en opportunité.

À travers la gouvernance renforcée, la valorisation énergétique et la mobilisation de financements verts, le FEAD 2025 ambitionne de faire de Kinshasa un modèle de ville propre, verte et résiliente. Transformer les déchets en richesses : tel est le pari audacieux d’un forum qui promet d’inscrire la capitale congolaise dans une nouvelle ère de développement durable, au profit de l’homme et de la planète.

Déborah Mbuyi
16 octobre 2025
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